INTERNET : LES RÉSEAUX SOCIAUX, REDOUTABLES "OPPOSANTS" EN AFRIQUE

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Depuis plus de trois semaines, la connexion à internet reste perturbée dans les deux régions anglophones du Cameroun (Nord-Ouest et Sud-Ouest). Les réseaux sociaux Facebook, WhatsApp et Twitter, eux, restent une denrée rare dans cette partie du pays.

Officieusement, c’est le gouvernement qui aurait suspendu ces plateformes pour taire toute hostilité à son encontre alors que la crise ne semble pas prête de s’arrêter avec le report du procès de trois leaders de la contestation arrêtés il y a plus d’une semaine.

Mais, le Cameroun n’est pas un pionnier en la matière. Plusieurs autorités africaines ont dû se séparer de ces outils “gênants” devenus le canal par excellence pour échanger les messages et informations en temps de crise ou d‘élection.

Mi décembre 2016, le gouvernement congolais avait suspendu les réseaux sociaux alors qu’avançait à grands pas la fin du mandat du président Joseph Kabila le 19 décembre. L’opération avait déjà été expérimentée en 2015, dans la foulée de violentes manifestations antigouvernementales.

Au même mois de décembre, c’est la Gambie de Yahya Jammeh qui coupait les médias sociaux à la veille de la présidentielle remportée par Adama Barrow. Les élections présidentielles au Gabon en août 2016, au Tchad en avril de la même année ou en République du Congo en mars, avaient subi le même processus : suspension des réseaux sociaux.

L‘Égypte pour sa part avait connu le plus grand black out jamais orchestré officiellement selon les experts. Pris dans la vague du printemps arabe en janvier 2011, le président d’alors Hosni Moubarak avait demandé à tous les fournisseurs d’accès à internet de couper la connexion dont se servaient les leaders de la contestation antigouvernementale pour coordonner les rassemblements, lançant notamment des appels sur Facebook.

Opposants en perte de vitesse

Une étude réalisée à l’initiative de CFI, l’agence publique française d’aide au développement des médias du Sud s’est penché sur l‘émergence des réseaux sociaux sur le continent africain. On y note comment il est aujourd’hui facile d’accéder aux réseaux sociaux en Afrique.

“Pas besoin d’un ordinateur ni d’une adresse e-mail pour ouvrir un compte Facebook, un numéro de téléphone suffit”, souligne un des auteurs de l‘étude, Philippe Couve, rappelant qu’un smartphone chinois s’acquiert à partir de 50 dollars en Afrique. Des conditions non-négligeables quand on sait la médiocrité des bandes passantes en Afrique.

Aussi, Facebook (également propriétaire de WhatsApp) est souvent gratuit dans plusieurs pays africains en vertu d’un accord conclu par son propriétaire Mark Zuckerberg avec des opérateurs télécoms d’une vingtaine de pays.

Mais pour remonter à l’origine de l’impulsion des réseaux sociaux sur le continent, il faut également se tourner vers l’opposition politique qui s‘érode face à certains régimes. Effectivement, ils sont aujourd’hui rares les opposants fort par le charisme que par l’idéologie et qui arrivent à dire non à un pouvoir souvent qualifié de dictatorial et autoritaire. Les opposants politiques dans certains pays ne sont souvent réduits qu‘à leur simple expression, craignant des représailles du régime.

La jeunesse alors en quête d’un espace privilégié d’expression n’a pas hésité à se servir massivement des médias sociaux, où jusque-là la répression est quasi-inexistante, pour exprimer et imposer leur choix.

Législation naissante

Toutefois, comme en toute chose, les réseaux sociaux renferment quelques désavantages. La citoyenneté numérique n’est apparemment pas encore perçue par tous les utilisateurs.

Bien des fois, les médias sociaux se présentent comme une caisse à résonnance déformante de la réalité. Les rumeurs y sont propagées. Lors de certaines élections sur le continent, des partisans de candidats s‘étaient empressés de salir leurs adversaires sur ces plateformes. Des rumeurs parfois relayées jusque dans les médias conventionnels.

Aidés d’un vide juridique, les réseaux sociaux continuent leur course folle, mais peut-être plus pour longtemps. Certains États comme le Cameroun ont engagé des réformes afin de punir les auteurs de fausses informations sur les réseaux sociaux.

De quoi faire dire les autorités ont de plus en plus le nez dans le plat. “On en a fini avec la période bénie où les autorités ne comprenaient pas bien ce que nous faisions”, souligne Cheikh Fall, cyberactivistes et fondateur du réseau panafricain de cyberactivistes africtivistes.org (150 membres dans 35 pays).

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